César et les Romains
César et les Romains
- Groupe (Dino L’Espérance, Daniel Lachance, Jacques Moisan, Donald Seward, Pierre Sidor)
- Interprète
- Artiste québécois
Ressources web
Biographie
Si la multiplication des groupes musicaux au milieu des années soixante a pu donner à certains l’impression d’une génération spontanée dans les sillages des Beatles, Rolling Stones et autres formations britanniques, plusieurs de ces musiciens avaient déjà une longue expérience dans les salles de danse et autres clubs de la Belle Province. Originaires de Rouyn-Noranda, en Abitibi, les futurs Romains se font d’abord connaître sous le nom des Questions. Exposés aux stations de radio américaines et au répertoire des musiciens en visite dans cette région frontalière, ils se prennent d’affection pour les styles funky et soul que pratiquent alors les musiciens noirs en tournée nord-américaine.
Lorsqu’ils se rendent à Montréal, Dino & the Questions le font en suivant cette filière qui leur est naturelle et aboutissent sur la scène du réputé Esquire Show Bar, là où se produisent la plupart des orchestres de couleur. C’est cependant dans un autre établissement, le Café de l’Est, qu’ils feront la rencontre la plus déterminante de leur carrière en la personne de Dominique Mandanice, propriétaire de l’endroit. Celui-ci est déjà impliqué dans la gérance de jeunes groupes musicaux, ayant vu aux premiers pas des Beatlettes et des Five Bells. La prestance et le professionnalisme des Questions l’impressionnent, tout comme la facilité qu’a le chanteur du groupe à intérioriser le propos des chansons, à la façon des interprètes soul comme James Brown et Ben E.King.
Le 25 avril 1965, le groupe se présente pour la première fois sous le nom et les costumes de César et les Romains. Quelques jours plus tard, leur premier 45 tours “Splish splash" et “Alors c’était lui" est présenté à l’émission Jeunesse d’aujourd’hui. Le 13 mai, ils parcourent un segment de la rue Sainte-Catherine qui les mène, tels les empereurs et généraux de l’Antiquité défilant en triomphe, au Café St-Jacques où est inauguré le nouveau rendez-vous à la mode, le Club Yé-Yé qui verra se succéder à son affiche la crème de ce style musical alors en pleine expansion.
À l’automne, les Romains parcourent les routes de l’empire sous les auspices du célèbre Jean Grimaldi. Le nouveau simple “Toi et moi" et “Pour toi" atteint de nouveaux sommets de ventes, tout comme leur premier album dont une chanson connaît un fort succès au palmarès sans être distribuée en format 45 tours, un précédent dans le monde de la musique pop au Québec. Il s’agit de “Je sais", une composition du chanteur français Claude François. Le microsillon contient son lot de ballades sentimentales et de reprises énergiques où le guitariste Daniel Lachance se révèle un des musiciens les plus doués de toute la cohorte des groupes yé-yé.
Début 1966, les Romains et les Gendarmes sont les premiers artistes à paraître sur la nouvelle étiquette Citation, propriété de monsieur Mandanice, gérant des deux groupes. Le nouveau succès de César et les Romains est nul autre que “C’est la fin", une nouvelle adaptation d’un succès d’Elvis Presley après “Alors c’était lui" et “La vie", tandis que “Tu dis non" est un titre original signé par César, George Lagios et Pierre Sidor. Ce dernier est le nouveau bassiste des Romains qui vient de succéder à Maurice Bélanger parti fonder son propre groupe Cléo, Mo et les Pieds Fous, allusion au fameux jeu de jambe du musicien sur scène. Quelques mois plus tard, le premier microsillon de la maison Citation est celui de César et les Romains. Intitulé “XII x V“, il regroupe douze titres dont ceux des 45 tours “C’est la fin" et “Trop seul sans toi" (version de “Lonely Boy" du Canadien Paul Anka) et contient cinq nouvelles compositions du groupe, hélas rapidement occultées par la reprise du succès de Petula Clark “Que faut-il faire pour oublier" et surtout le standard sud-américain “Granada" que César interprète en spectacle depuis plusieurs années.
Au Gala des Artistes 1966, nul n’est surpris de voir les musiciens désignés comme le Groupe le plus spectaculaire de l’année. Têtes d’affiche au cabaret, ils sont aussi en forte demande en province et les tournées se succèdent, ne leur laissant que peu de loisirs: nouvelle tournée Grimaldi, Musicorama (un des premiers de cette formule au Québec) et bientôt les premiers engagements à l’étranger. Comme plusieurs des vedettes de l’heure, les Classels notamment, les Romains sont invités à se produire dans les endroits de villégiature que sont les Bahamas, Porto Rico et certaines villes de la côte-est américaine. Pour ces occasions, ils préfèrent la tenue de soirée, smoking et vêtements assortis, à ce qui est de plus en plus perçu comme une mascarade, une fois l’enthousiasme du début dissipé. C’est dans cet esprit que les membres du groupe procèdent à une immolation symbolique de leurs colorés vêtements de scène le printemps suivant.
L’année 1967 est d’ailleurs marquée d’une maturation du répertoire des Romains, ce qui se traduit par une certaine distance par rapport à la chanson adolescente et une recherche de reconnaissance auprès du public adulte, clientèle traditionnelle du monde du cabaret. Ils se rendent à New York participer à un spectacle promotionnel donné à Central Park et invitant nos voisins à venir visiter Expo 67. Sur disques, leur répertoire fait de plus en plus de place aux chansons d’artistes européens: “Le jour du dernier jour" (Procol Harum), “Par amour, par pitié" (Sylvie Vartan). “Yesterday" des Beatles est aussi incluse au troisième album du groupe, chantée dans sa langue d’origine. La pochette de ce nouveau 33 tours, le dernier à paraître pendant l’existence du groupe, nous montre d’ailleurs les cinq Romains en tenue de ville, sans les artifices de leur époque flamboyante. À la fin de l’année, ils participent à l’album collectif “Noël en groupe“ où ils chantent le standard “L’enfant au tambour".
La dernière année d’existence des Romains laisse s’installer une distanciation entre le chanteur soliste et ses musiciens. Les succès “Dalila" et “Je veux vivre" font appel aux orchestrations de Jerry de Villiers et leur rythme de valse n’a que peu à voir avec le répertoire de leurs débuts. Dans cette perspective de conquérir le circuit des grands casinos étrangers, ils enregistrent la version originale, en langue anglaise de certains de leurs titres, gravant au passage une adaptation de “Je sais" sous le titre “They Say". Quelques-uns de ces enregistrements paraîtront des années plus tard sur la compilation “Rock n’ Roll“. À la fin de l’année, la nouvelle tombe; le groupe est dissout.
Le chanteur fait équipe avec de nouveaux musiciens et se produit un temps sous le nom de César et Compagnie tout en continuant d’enregistrer, sous les noms de César ou de Dino L’Espérance jusqu’à la fin des années soixante-dix. Les autres Romains accompagnent l’organiste Donald Seward sur son premier album de musique instrumentale puis se dispersent vers divers horizons. Quelques années plus tard, César et les Romains sont de la fête lors d’un spectacle intitulé Le retour des groupes et donnée seulement à Montréal et à Québec lors de deux soirées consécutives, en 1975. Trente ans après leur premier séjour à Montréal, les cinq musiciens originaux entreprennent une série de spectacles à l’occasion de retrouvailles à l’Aréna Maurice-Richard. Ils retournent également en studio et gravent de nouveaux enregistrements de leurs anciens succès à l’été 1994, en plus d’une interprétation de “Jezabel", succès du début des années cinquante devenu un des standards du XXe siècle.
Le groupe était constitué de:
- Daniel Lachance: guitare
- Denis (Dino) L’Espérance: chant
- Jacques Moisan: batterie
- Donald Seward: orgue
- Pierre Sidor: basse (1966-1968)
Le groupe a aussi compté dans ses rangs:
- Maurice Bélanger: basse (1963–1966, 1994)
© Richard Baillargeon, Roger T. Drolet, 2015, qim.com