Les Classels
Les Classels
- Groupe (Michel Caron, Jean-Clément Drouin, Serge Drouin, Gilles Girard, Pierre Therrien)
- Auteur et/ou compositeur
- Interprète
- Artiste québécois
Ressources web
Biographie
Des centaines de groupes musicaux qui ont surgi aux quatre coins du Québec, pendant les années soixante, les Classels furent certes le plus célèbre et l’un des plus durables. Leur apparence immaculée, leur approche vocale impeccable et leur sonorité particulière en ont fait une des icônes populaires des sixties, façon québécoise.
Si leur image résulte d’une campagne promotionnelle bien orchestrée, dès l’hiver 1964, le style musical est le reflet de leur expérience des salles de danse et des clubs de nuit, depuis le début de la décennie. Témoins directs de l’éclosion du rock’n roll, les quatre musiciens des Special Tones donnent dès le départ une place de choix à l’aspect vocal de leurs interprétations qu’ils intègrent au travail des guitares, symbole de cette nouvelle vague musicale. La rencontre d’un jeune chanteur surnommé Danny Boy (de son vrai nom Gilles Girard), qui se joint finalement à eux, les amène à diversifier davantage leur répertoire, incluant certains succès de Paul Anka et de Frankie Laine, entre autres. Le groupe songe même à graver un 45 tours.
Mais le plus grand bouleversement survient à l’hiver 1963-64, quand s’amène d’Angleterre une succession sans précédent de groupe musicaux qui accaparent les meilleurs positions du hit parade mondial, Beatles et Dave Clark 5 en tête. C’est l’occasion rêvée: la demande pour les jeunes groupes musicaux se fait pressante et les cinq musiciens chanteurs ont déjà un répertoire éprouvé. Voici le moment de tenter sa chance!
De concert avec le nouveau gérant de la formation, Ben Kaye qui s’occupe aussi déjà des Baronets, on opte pour cette image de classe alliée à une sonorité bien de son temps qui identifie le groupe à tout jamais. Le nom est tout trouvé: “La classe est toujours un bon argument de vente... Class sells!" aurait dit l’un d’eux. Quant à la blancheur, déjà expérimentée sur leurs cheveux, elle s’étendra maintenant aux vêtements, aux chaussures et jusqu’à leurs instruments.
Contrairement à la plupart des groupes de l’époque, les Classels misent sur des chansons inédites pour leurs premiers enregistrements. Plusieurs sont le produit de la coopération entre Ben Kaye, Hal Stanley et le parolier Lucien Brien, à l’exception du premier succès Avant de me dire adieu" dont le texte est de Pière Sénécal. D’autres sont des compositions du guitariste Jean-Clément Drouin: “Oui c’est toi", “Tu le regretteras". Un premier album éponyme, lancé à l’été 1964, devient rapidement un standard de la discothèque de base des jeunes mélomanes, tout en trouvant grâce aux yeux des parents, distinction oblige. Le groupe termine par ailleurs cette première année de show-business en gravant, juste avant la période des Fêtes, la chanson hivernale “Le sentier de neige". Celle-ci s’avèrera, au fil des ans, un des plus grands succès saisonniers de composition québécoise.
L’année 1965, qui marque le véritable sommet commercial du style yé-yé, est encore largement dominée par la production des cinq hommes en blanc. Un nouvel album “Les Classels en spectacle“ suit de peu leur passage à la Comédie Canadienne, au mois de décembre précédent. On peut y entendre les interprétations publiques de leurs succès “Ton amour a changé ma vie" et “Avant de me dire adieu", des chansons des Platters, des Beatles ainsi que celles de leur prochain 45 tour. Encore une fois, une ballade du trio de choc Kaye-Stanley-Brien “Qu’est devenu notre passé" est complétée par une composition plus rythmée du guitariste Drouin: “Mon premier amour".
Le procédé est inversé pour leur disque suivant: cette fois, Ben Kaye et son équipe d’auteurs compositeurs donnent dans le rythme avec “N’attendons pas qu’il soit trop tard" tandis que Jean-Clément Drouin tente une réponse estivale au “Sentier de neige" avec “Viens au soleil". L’été donne aussi au groupe l’occasion de se produire dans les endroits de villégiature de la côte est américaine. C’est sans doute pourquoi la saison est également marqué par la parution de versions anglophones de certains de leurs succès: “Before You Say Goodbye", “Please Wait For Me", “Tomorrow May Be Too Late". Cette incursion en territoire américain se répétera pendant plusieurs étés.
Pendant ce temps, au Québec, la vague des groupes prend l’envergure d’un raz-de-marée local: les Excentriques, les Jaguars, César et les Romains, les Habits Jaunes, les Têtes Blanches, les Gendarmes, les Bel-Air et autres Bel Canto tournent tous dans les juke-box et se retrouvent sur la plupart des palmarès radio. L’heure n’est plus à la ballade, chez les jeunes du moins. Il n’est donc pas surprenant, à la rentrée, que ce soit le côté B du nouveau 45 tours, un pièce au titre plus contemporain “Les révoltés" qui ait la préférence du public de Jeunesse d’aujourd’hui, de plus en plus influent sur le classement aux différents palmarès.
Devant le nombre croissant de jeunes groupes à se disputer l’attention des adolescents, les Classels font le pari de rejoindre également le public adulte et de faire ainsi le pont entre les générations. Le contexte semble leur donner raison puisqu’un des classiques de Gilbert Bécaud se trouve justement dans le top 20 américain, repris par Sonny & Cher. Les Classels en adaptent les arrangements et enregistrent le texte original de Bécaud. “Et maintenant" devient rapidement un de leurs grands succès, suivi quelques mois plus tard par “Exodus" qu’avait popularisé Édith Piaf. Les Classels sont désormais des vedettes établies dans le monde du spectacle et il n’est pas étonnant qu’on pense à eux pour la première série de prestations à se tenir sur le site d’Expo 67, dès l’ouverture de l’exposition universelle. Dans la foulée de l’événement, le groupe grave un 45 tours de circonstance, bilingue: “Le monde a rendez-vous à Montréal / Everybody’s Coming To Montréal".
1967 marque aussi l’arrivée de la couleur sur les ondes de la télé québécoise. Cette innovation technologique n’est pas sans affecter le groupe le plus populaire du Québec. Pour mieux passer à l’écran, les musiciens doivent recourir à un subterfuge: ils portent désormais, devant la caméra, des vêtements gris pâle afin d’éviter un éblouissement de l’appareil. Du blanc au gris, il ne reste qu’un pas pour en venir aux Classels en couleurs. C’est chose faite quelques mois plus tard lorsque le groupe présente un nouvel album où chacun arbore un habit de couleur vive. L’album contient un habile dosage où les fans de tout âge trouvent quelques refrains à leur convenance: les succès du jour comme “Funky Broadway", “In The Midnight Hour" ou leur reprise funky de “Les trois cloches" côtoient les nouveau standards que sont “Dalila", “Woman" ou “L’amour est bleu".
Mais le vent des années soixante souffle de plus en plus fort, sans égard au statut des idoles qu’il a lui-même contribué à imposer. Les dernières années de la décennie sont fatales à la plupart des groupes qui, hier encore, étaient les rois des palmarès. D’une part, la concurrence des discothèques se fait plus pressante à partir de l’été de l’Expo; d’autre part, les nouvelles tendances musicales et les modes de comportement se succèdent à un rythme que bien peu de gens peuvent assimiler. D’où un roulement de plus en plus rapide, tant au niveau des publics de plus en plus jeunes que des artistes de la scène et du disque.
Forts de leur ancrage chez les plus de vingt ans, les Classels réussissent à classer encore quelques succès dans les palmarès avant la fin de la décennie: “Cette chanson-là", “En marchant sur la plage" et “Si j’étais millionnaire", malgré leur écart temporel, gardent le groupe sous les feux de l’actualité. Les oeuvres de référence de ces chansons datent en effet de 1947 (“The Anniversary Song" de Al Jolson), 1953 (“Just Walking In The Rain" des Prisonaires, repris en 1956 par Johnny Ray) et 1969 (“Bad Moon Rising" de Creedence Clearwater Revival)!
En cette époque où les anciens filons underground deviennent les nouveaux courants dominants, bien peu de fans auront eu la patience d’attendre les audaces musicales de “Perdu", “Je m’éveille" ou encore de “L’herbe de la paix". Après un ultime 45 tours, encore plus discret, le groupe se dissout en 1971.
Après quelques mois de repos, le chanteur Gilles Girard reprend la route et se produit avec de nouveaux musiciens. Au fil des ans, les Super Classels, Solid Gold et Poker accompagneront le chanteur soliste. Parmi ses anciens collègues, on verra le nom de Jean-Clément Drouin en tant que réalisateur sur des disques de Patrick Norman puis, plus récemment, des Jaguars et de Pierre Lalonde. Suite à des reformations épisodiques dont la tournée De Jeunesse à aujourd’hui en 1988, puis un nouvel enregistrement “Je pense à toi" en 1991, Michel Caron remonte sur scène en solo au milieu des années quatre-vingt-dix. En 1998, la maison de disques Mérite réédite 62 chansons des Classels en trois albums audionumériques.
Le groupe était constitué de:
- Michel Caron: guitare, chant
- Jean-Clément Drouin: guitare, chant
- Serge Drouin: batterie
- Gilles Girard: chant
- Pierre Therrien: basse, chant
© Richard Baillargeon, Roger T. Drolet, 2015, qim.com